Tu es très mignon, mais tu n’as pas une bite intéressante : tu peux sans doute jouer dans des films normaux, perdu dans la masse des acteurs anonymes qui ne marqueront pas le septième art. Ou faire de la figuration, si jamais tu n’es pas convaincant quand tu récites ton texte.
Quelle déception pour toi, cher ami ! Toi qui pensais que ton sexe faisait le délice des hommes et des femmes qu’il rencontrait, parfois, ces nuits de voyages intérieurs ! Ont-ils feint le plaisir et l’orgasme pour protéger cette beauté qui est tienne, ne montrant rien de leurs déceptions sans doute plus amères que la tienne ? Ont-ils inventé ces convulsions sonores, ces transes du corps, toute cette énergie sexuelle qu’ils t’ont offerte sur un plateau doré, une avalanche de miettes fantômes ?
A la tienne, je bois à ta santé, et tes possibles reconversions : tant d’acteurs plus ou moins désoeuvrés sortent du porno, pour y revenir, toi, mon garçon, tu ne peux même pas espérer y faire les prémices d’une excursion ! Les petits poneys, c’est bien seulement pour les enfants : ces hommes et ces femmes qui dardent leurs orifices en haute définition ont besoin d’étalons performants, et perforants.
Fin de la séance de recrutement, je prends la pose devant la vitre, fume une cigarette, repense à lui, son corps sculptural, ses petites pommes de fesses adorables qui appellent la morsure : qu’il était beau, ce jeune homme étonnant, ce candide métrosexuel, parfait… à quelques centimètres près. Quel déplaisir de l’éconduire. Et pourtant : qui se souviendrait, dans cet océan de foutre qu’il nous plaît de filmer, du visage d’un ange à peine sexué, indiqué pour les frasques de l’amour ? Qui donc banderait pour un garçon qui n’a pour lui que la beauté mais qui ne peut soutenir l’infernal fantasme qu’il suscite ?
Nous nous souvenons tous des chibres émouvants qui nous ont déchiré l’anus – même en rêve – et des garçons aux corps sucrés, presque sacrés, qui ne parlent qu’en borborygmes lorsqu’ils s’activent sur vous avec l’empressement d’un taureau victime de fièvre porcine, ces hommes [Animal Minimal] nous laissent des séquelles ad vitam et ressuscitent dans chaque abandon de la conscience nos instincts les plus bas. Ce sont eux, et eux seuls, qui pilotent notre anarchie.
Texte éjaculé le 21 novembre 2012.
Ce texte fait partie de l’anthologie Au Bonheur des Drames :
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Ah ben là ta position sur le sujet, de taille, est claire.
Mais est-ce bien toi ?