La Villa Déplaisir
Tu passais des heures à reluquer des jeunes vaniteux s’émoustiller dans une villa stupide, à considérer avec jalousie, une verve incendiaire, des humains falsifiés fomentant à loisir, pour le meilleur et surtout pour le pire, des assassinats de petite volée, à base de révélations douteuses, séductions graveleuses : comme sont réjouissants ce mille-feuilles d’embrassades élégantes, ces corps allégés qui s’entremêlent pour mieux se détruire dans le gras de la vulgarité ; une légende à la petite semaine, la splendide érection d’un monument à l’effigie du vide.
De voir, d’aimer, ces torses bétonnés pour la guerre, ces poitrines opulentes flotter comme des astres dans l’azur des piscines, ces dents qui scintillent comme des diamants sous l’artificielle lumière d’un soleil vermillon, ces paroles un peu folles aussi stupides que des papillons, conférait à ton existence des charmes exsangues et désuets : les stigmates impériaux d’un ennui sidéral, une vie entière dans les fers, glamour au placard, l’existence d’une supernova noyée dans l’abîme absolu d’un trou noir.
Avide candidate au vide, chancre d’une galaxie promise, à la mesure d’un ego, c’est avec un espoir magistral que tu postais, enfin, cette lettre sans orthographe tant méditée, assortie, comme autant de bonbons dans une pochette surprises, de photographies pornographiques usuelles, celles que l’on destine sans méditation à ces magnats de la télévision, les sentinelles du néant.
Las, malgré cette longue prière, terrible monologue, à ce Dieu que tu ne redoutes pas, tandis que tu courbes enfin l’échine sous un bureau sans poussière, abasourdie par la dernière boucle techno à la mode et l’odeur âcre, cancéreuse, d’un chibre frippé, tu troques ta bouche jusqu’alors sinistrée contre un bout d’essai : la prostitution, l’essence même de ta révélation.
Texte écrit le 23 mars 2012
Ce texte fait partie de l’anthologie Au Bonheur des Drames :
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avril 27th, 2012 at 7:03
Merci à toi! Ton compliment me touche. Je te souhaite un excellent week-end 😉
avril 28th, 2012 at 12:44
La vacuité rend sans doute les choses, la vie, beaucoup plus facile, non ?
Je suis tombé amoureux de cette phrase : « […] ces corps allégés qui s’entremêlent pour mieux se détruire dans le gras de la vulgarité ; une légende à la petite semaine, la splendide érection d’un monument à l’effigie du vide. »