Insecte
Nuit.
De retour dans mon appartement, je suis envahi par cette curieuse odeur de bombyx, de cendres et d’encens intriguant ma narine, qui n’est pas sans rappeler l’odeur puissante du cancer imprégnée dans le salon ma défunte mère : cette odeur qui préfigure sans doute la mort, lorsqu’elle pose son empire sur un être humain et qu’elle loge avec lui.
Plus tard, je vois cet étrange mille-pattes protéiforme faire une ronde sur le mur. Je crois férocement à une hallucination, une ruse du diable, tant la bête est étrange : un corps longiligne, une tête formée de trois cornes d’une longueur saisissante. Je lui vaporise, bien qu’elle soit rampante, mais point vivace comme le sont les mille-pattes lorsqu’ils sont repérés, cet insecticide contre les insectes volants, résidu d’innombrables génocides. L’insecte tombe et meurt aussitôt comme un mirage. Je pense alors qu’il s’agit d’un être réincarné – et j’ai honte de mon geste.
L’étrange insecte, laissé pour mort quelques heures, a finalement disparu, volatilisé ; voilà qui est fort curieux et inquiétant. Il est sans doute préférable que ce soit une hallucination.
061012
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Un insecte tricorne bien inquiétant. Il y aurait bien des choses que l’on voudra voir disparaître aussi facilement. Fais attention à toi, au cas où la bête roderait encore dans la maison.
Par ta plume, je suis transporté dans ton appartement.
La monstruosité de la bête, l’atmosphère pesante régnant dans cet appartement est terriblement angoissant.
Au-delà d’une hallucination, ne doit-on pas percevoir, par cette manifestation, la projection inconsciente de souffrances enfouies au fond de nous, et se matérialisant quelques instants dans le monde réel ?
Une sorte de soupape mécanique intérieure permettant de nous protéger.
Extraordinaire.
Sympathique instantané de vie, toujours écrit de main de maître. Très agréable lecture.
C’est ma première rencontre avec ton journal, et je ne peux qu’y revenir. J’ai tant à lire de toi, et c’est autant d’agréables promesses d’immersion dans tes mondes.
Quant à ce curieux mille-pattes, tu as raison, il vaut mieux envisager l’hallucination.
Sinon j’ai deux jours de rab, deux jours de suppléments Nicotinés. Hourra !