Homo/nyme
Un Nicolas peut en cacher un autre : tout dépend des positions qu’ils prennent, alanguis, sur la surface moelleuse d’un canapé. Qu’ils plient ou déplient leurs corps élastiques, ils s’émeuvent comme des marionnettes loin des instants amoureux et disparaissent aux plis sinueux des mouchoirs en papier.
Que sont-ils, ces Nicolas, dieux grecs éventés ou vampyrs effarés, chimères schizoïdes et détraquées dont les yeux vipérins occultent toute présence qui n’a pas la saveur d’un ego ? Les fêtes, pour eux, ne sont qu’un amas de plaisanteries et promesses avariées soumises à l’aléatoire d’un agenda. Après l’amour, l’un s’évapore dans un rire sonore, l’autre dans la nicotine.
Quand ils se rencontrent, ils font des étincelles, inventent des constellations puis, énamourés, emmurés, meurent ensemble aux petits matins qui se ressemblent. Leurs cadavres, autrefois exquis, s’appellent sans cesse et se refusent, s’entremêlent et se réfutent. Parfois, le Fantasme infuse dans l’âpre liqueur d’un crachat.
Mains osseuses et peaux ridées : l’amour rend monstrueux quand l’homonyme nous dévore, prend l’ascendant sur notre corps avec cette mécanique sournoise des amoureux gourmands. Son visage, de plus en plus proche, perd son humanité et nous renvoie au gouffre avec la délicatesse d’une gorgone.
Envoi : ce n’est pas un crime, mon homonyme, que de parler de toi, de t’implanter dans ces décors masculins, parmi les vestiges d’un passé sulfureux, un été de collégien, d’asseoir la vérité sur l’autel crucifié des vies déchues.
Texte pondu le 13 janvier 2014
Ce texte fait partie de l’anthologie Au Bonheur des Drames :
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