La Mort d’un Ange
Il est là et beau, dans les ténèbres voulues de son appartement… La destruction de ce corps se ravit de sa drogue d’amour, et semble ne plus vouloir se coucher que dans la dysphorie, se résoudre à devenir plus propre dans son vice, le rendre moins opaque, plus transparent, par la négation de toutes les douleurs attenantes au passé. Sur ce grand lit seuls reposent le long corps d’une seringue lasse, hantée par une substance qui hante, un téléphone décroché et sa plainte infernale ne le réveillant pas, une revue érotique aux pages cornées, annotée pour l’éphémère… Les ténèbres dessinent amoureusement autour de ce drame – la seringue brille, brille, sous la lumière de la lune – quelques meubles déserts, des fantômes de meubles sans existences… Il repose là, sourire aux lèvres, en face de cette lune magnifique qui, derrière la vitre, semble l’inviter pour un délicieux voyage, loin de la vie, loin de tout, pour un monde peut-être plus merveilleux, plus doux… Il touche fébrilement, comme s’il ne voulait plus la quitter, lié à elle pour toujours par un pacte nébuleux, cette longue seringue qui n’en finit plus de briller. Il en sourit une dernière fois, majestueusement : avec grand fracas, la porte de l’appartement vola en éclat. Des hommes forts, aux gestes violents, la lèvre morne et habillés de noir vinrent s’agenouiller vers son corps sans vie pour poser, en toute hâte, leurs mains froides et rugueuses sur son coeur refroidi par la mort et fermèrent ensuite, à jamais, son grand sourire rieur.
Extrait du recueil Les Corps Cendrés :
Vous aimerez peut-être :
octobre 30th, 2012 at 8:26
Bien que n’appréciant pas particulièrement Hugo (voire pas du tout en fait, si ce n’est le poème La Conscience), je suis flatté par ce parallèle somme toute étrange.
« La lune était sereine et jouait sur les flots.
La fenêtre enfin libre est ouverte à la brise.
La sultane regarde et la mer qui se brise
Là bas d’un flot d’argent brode les noirs îlots. »
Victor Hugo
C’est à ça que j’ai pensé en lisant ton texte.